Le château de Trémazan dresse encore aujourd'hui les ruines de son impressionnant donjon du XIIIe siècle à Landunvez(mer d'Iroise-Finistère), au pays des Abers et de la Côte des Légendes.
Le château de Trémazan a une histoire:
Sous le règne de Judual, roi de Domnonée, lequel s'était réfugié pour lors en France à la cour du roi Childebert, environ vers l'an de grâce 525, vivait au Château de Trémazan un riche seigneur du nom de Galonus.
Il avait eu de sa première femme, la belle Fleurance, fille d'Honorius, prince de Brest, deux enfants, Eode et Tanguy, que leur mère avait élevés en belles lettres et exercices séants à leur qualité.
Mais la belle princesse, étant tombée malade, mourut subitement les laissant à la seule garde de leur père.
Galonus qui était encore jeune et qui souffrait bien fort de la solitude de sa demeure, s'en fut en Angleterre chercher une autre épouse; il en ramena une dame riche et de bonne maison. Cette nouvelle dame ne fut guère en son ménage qu'elle commença à regarder de travers les rejetons de la belle Fleurance. Elle les rudoya de paroles , maltraita de gestes et fit tant enfin que Tanguy, déjà grand, à qui le sang commençait à bouillonner dans les veines , obtint congé de son père, quitta le pays, monta sur mer, descendit en Neustrie et s'en vint par terre à Paris dans la cour du roi de France, où se trouvait déjà son souverain légitime.
Il y passa douze ans, paraissant aux tournois et se signalant en tous lieux parmi les plus vaillants et les plus courageux. La méchante marâtre anglaise pendant l'absence du fils, fit endurer mille tortures à la douce Eode, demeurée près de son père. Elle congédia d'abord ses demoiselles et servantes, puis la força à faire le service de la maison, à puiser de l'eau, à balayer les salles, à se mettre de cuisine, à laver la vaisselle, ne la nourrissant que de gros pain sec et de viandes grossières, lui enlevant ses beaux habits pour la forcer à se revêtir de rude laine; finalement l'envoya en une sienne métairie où on lui fit garder les vaches comme une simple pauvresse en haillons.
Eode, à laquelle jamais n'échappa parole d'impatience, y demeura près de douze ans, conservant inviolablement le lys de sa virginité. Dans sa pénurie elle trouvait encore moyen de porter l'aumône aux pauvres gens, et ne murmurant pas même en son cœur une plainte contre sa cruelle marâtre.
Vers cette époque, Tanguy s'en vint au pays, si brave et en tel équipage qu'on ne le pouvait reconnaître. Comme il s'informait d'Eode à la marâtre, celle-ci le prenant pour un riche seigneur qui voulait la rechercher en mariage , la lui déchiffra comme une fille perdue et abandonnée, et lui affirma qu'elle avait été obligée d'éloigner du logis cette peste pour ne pas tolérer les infamies qu'elle commettait journellement dans sa maison.
Tanguy crut aussitôt les calomnies de cette femme, et laissant ses gens au château de son père s'en alla chercher sa soeur. L'ayant trouvée près d'une fontaine en train de laver quelques hardes, il l'appela par son nom :Eode! Eode! Celle-ci qui ne le reconnaissait pas , ne sachant à quelle fin ce gentilhomme l'interpellait , laissa ses hardes et s'enfuit. Alors Tanguy, se figurant qu'elle n'osait se présenter devant lui parce qu'elle avait forfait à l'honneur, mettant en main l'épée, la poursuivit vivement et, l'ayant rattrapée, lui déchargea un si grand coup sur le col qu'il lui trancha la tête.
Les habitants du hameau étaient sortis de leurs maisons, et fondant en larmes à cette vue, il s'enquit d'eux, demandant quelle vie avait menée sa soeur, il apprit que c'était une sage, sainte, vertueuse demoiselle, qui avait étonné tout le pays par son admirable patience à supporter les outrages de sa marâtre.
Ayant ouï ce récit, et voyant qu'au seul rapport de l'infâme épouse de son père, dont il connaissait pourtant la malice, il avait si malheureusement massacré son innocente soeur, il pensa mourir de douleur et de déplaisir.
De retour à la maison il se fit reconnaître, puis alors récita à son père ce qu'il avait fait et que, de sa propre main, il avait tué sa chère Eode.
Galonus fut extrêmement affligé de cette triste nouvelle. Quant à sa femme, elle ne put retenir sa joie tant elle haïssait sa belle-fille.
Mais Dieu, qui fit sortir l'huile du rocher, tira de ce massacre la conversion de Tanguy et la punition exemplaire de la marâtre, ainsi que nous allons voir.
Comme ils étaient en la salle, mangeant et buvant à l'ordinaire, Eode, tenant sa tête à la main entra, puis l'ayant posée sur ses épaules se récapita d'elle-même, et interpellant sa belle-mère, lui reprocha sa perfidie et sa lâcheté inique, et lui annonça la soudaine vengeance de Dieu.
Alors, il se fit un grand éclat de tonnerre, et la marâtre, tombant à terre, vida ses boyaux et intestins1 et, blasphémant Dieu en une vraie hérétique qu'elle était, rendit son âme en présence de tous les assistants terrifiés.
Tanguy subitement touché, se jeta aux pieds d'Eode qi, lui mettant la main sur l'épaule lui pardonna de tout son coeur, puis l'ayant accolé, lui ordonna pénitence. Alors elle s'assit près de la pierre du foyer, regarda quelques temps les siens en souriant, puis laissa échapper sa belle âme. Ce fut le 18 novembre en l'an 545, ainsi que les bréviaires du pays en font mémoire. Son corps fut inhumé en l'église paroissiale de Landunvez , au sépulcre de ses ancêtres.
Quant à Tanguy, étant sorti de la maison de son père, il s'en vint trouver saint Pol à Occismor, confessa son péché et fut reçu à merci par le grand apôtre du Léon.
Puis alors, il se retira au monastère de l'abbaye du Relec, en ce temps nommé l'Oratoire de Gerber, qui signifie "courte parole", parce que le silence était la règle de cette sainte maison.
Mais à cette époque advint sur un rocher, de pen ar bed le naufrage d'un navire Léonais qui allait trafiquer en Egypte. Ce navire portait la relique de Saint Mathieu, apôtre et évangéliste. Poussé par les flots, il heurta de rudesse un grand écueil qui paraissait à fleur d'eau. Les matelots du dedans crièrent miséricorde, pensant être tous perdus, mais, chose merveilleuse, le roc se fendit en deux, donnant passage au vaisseau chargé du précieux trésor.
En mémoire de ce miracle, Tanguy auquel cette côte appartenait, pour terminer sa repentance construisit en ce lieu la fameuse abbaye qui depuis, s'est appelée Saint Mathieu, puis mourut quelques temps après vénéré par tous et sanctifié par les larmes qu'il répandit en expiation du meurtre de sa soeur bien aimée.
C'est de ce saint que les seigneurs du Chastel, qui tenaient la terre de Tremazan, ont retenu le nom de Tanguy, que les français écrivent Tanneguy en prononçant à la manière armoricaine. Le mot tan-gwir veut dire vrai feu .
Extrait du livre "Au pays de mes ancêtres d'Auguste Bergot"
1. Depuis, là seulement, pousse une fleur qu'on a applelée en souvenir de l'évènement: bouzellou an intron, (les boyaux de la dame)
2. Les sires du Chastel tiraient leur titre de ce même donjon de Trémazan qui s'appelait dans le pays Tremazan le Chastel; leurs armes se composaient d'un fascé d'or et de gueules de six pièces avec la devise De vad e teui tu viendras à bien. Ils ont toujours été plus français que bretons.
Outre Bernard le Croisé, on trouve dans leur généalogie un grand maître de la maison du roi en 1449 et un grand panetier de France tué au siège de Pontoise en 1441. Ils se sont fondus dans la maison de Rieux, puis leur terre a passé aux Scepaux, aux Gondi et en fin de compte aux Gontaut-Biron.
Malgré la conversion de leur premier ancêtre ils gardèrent dans le caractère je ne sais quoi de féroce. On se souvient que c'est un Tanneguy du Chastel qui, sur le pont de Montereau, asséna sur la tête de Jean sans Peur le fameux coup de hache qui fit le trou par lequel, comme le disait plus tard à François 1er le prieur des Chartreux de Dijon, les anglais pénétrèrent dans le royaume de France.
Dans mon introduction, j'ai rapidement fait allusion aux enclos paroissiaux. Ainsi que je vous l'avais expliqué, ils se composent en général d'une porte(ou arc) triomphale, d'un calvaire, d'un ossuaire et parfois d'une fontaine regroupés autour d'une église. Cet ensemble monumental est fort souvent présent dans les bourgs bretons et on ne peut quitter la région sans avoir visité au moins l'un d'entre eux.
Ayant bien souvent pour centre le cimetière, ces endroits permettaient à la vie spirituelle de la paroisse dêtre étroitement rattachée à la communauté des morts. La pensée de la mort "L'Ankou" familière aux bretons est bien souvent représentée.
Construits en granit local, les enclos sont agrémentés de statues et de personnages sculptées dans la pierre de Kersanton beaucoup plus facile à travailler.
La rivalité qui existait alors entre les villages explique leur richesse extrême.
C'est à Guimiliau dans le finistère nord, à la pointe de la bretagne(7 kms de Landivisiau) que j'ai choisi de vous entrainer. Le village doit son nom à son saint patron, Saint Miliau, prince bon et pieux descendant des anciens rois de Bretagne et père de Saint Mélar(dont je vous ai déjà raconté la légende) qui fut décapité sur l'ordre de son frère en 792.
L'enclos paroissial de Guimiliau est d'une beauté remarquable et l'on vient bien souvent de très loin pour admirer cet ensemble architectural qui vous transporte hors du temps dans la magie du pays des légendes.
Le visiteur y pénètre par une porte triomphale qui bien qu'assez modeste est surmontée de deux cavaliers.
A droite, se dresse le grand calvaire, commencé en 1581, il est dit on le plus peuplé. Sur un socle massif, plus de deux cents personnages nous racontent le vie et la passion du Christ. Surmontés par une croix, ces 25 scènes ont de quoi nous émerveiller. Finement sculptées, on y retrouve par les costumes de l'époque la mentalité et les coutumes du 16ème siècle.
Le grand ossuaire encore appelée chapelle funéraire fut construit au milieu du 17ème. De style renaissance, il possède une chaire extérieure qui servait aux homélies de plein air, en particulier au jour des morts.
Le porche sud de l'église est un chef d'oeuvre d'une grande complexité. Très structuré, il est richement décoré. Sur sa gauche, se dresse un petit ossuaire dont les sculptures du soubassement sont aussi intéressantes que difficiles à interpréter.
Quant à l'église, bel exemple du gothique flamboyant breton, auquel on a rajouté quelques détails de la renaissance, elle contient un remarquable mobilier de la fin du 17ème, dont un baptistère de 1675, véritable oeuvre d'art du baroque.
Nous sommes en 142O, la Bretagne vit son âge d'or. Les ducs de Rohan tiennent leur rang et lancent la construction de ce qui deviendra un chef d'oeuvre de l'art gothique flamboyant breton : Notre Dame de Kernascléden.
Petite commune renommée du fait de cet admirable monument, Kernascléden voisine de la romantique forêt de Pontcallec(célèbre repaire des chouans) se trouve dans le canton de Guéméné-sur-Scorff à mi chemin entre Lorient et Pontivy.
Très caractéristique du gothique flamboyant avec le clocher du pignon, le développement de la façade sud avec sa vaste rose, ses deux porches(le porche des hommes et le porche des dames) et son grand chevet plat percé d'une maitresse vitre, l'édifice possède une architecture exceptionnelle.
Partout, la pierre est dentelée et festonnée. On retrouve la même finesse dans les porches dont l'un abrite les statues des apôtres ou dans les balustrades et contreforts ornés de niches, de pinacles et de gargouilles.
A l'intérieur, les arcs soutiennent une des rares voûtes de Bretagne mais ce qui est peut être le plus beau à voir en cet endroit, ce sont les peintures qui couvrent les voûtes du croisillon nord(anges, musiciens et ascension) et, surtout , du choeur(scènes de la vie de Marie et de Jésus). Ces splendeurs que l'on regrette bien sur de ne pouvoir approcher de plus près constituent un fort bel exemple de l'art français du XVème.
Celles du croisillon nord sont moins belles mais beaucoup plus surprenantes voire dérangeantes. Il s'agit de saisissants fragments de fresques recouverts de peinture par les pretres à une époque et mis à jour aux environs de 1912.
Frapper les esprits et assurer leur prestige
Tel était le but des nobles mécènes... Mission accomplie avec "L'Enfer" une peinture murale à la fois inquiétante et drole qui éclaire le bras sud du transept. Les damnés mijotent dans des marmites ventrues touillées par des démons hilares.
Seigneur ou laboureur, chacun se présente sur un pied d'égalité devant la mort.
Tel est le message de la "Danse Macabre", fresque voisine de "L'Enfer". Tout le monde passe de l'autre coté du miroir : du pape au roi jusqu'au pauvre gueux.
Le "Gothique" apparait dès la fin du XIIème siècle venant de la Loire mais surtout de la Normandie et de l'Angleterre. Cathédrales, Abbayes et Chapelles plus modestes se dressent un peu partout avec des caractères dont certains vont marquer longtemps l'architecture bretonne.
Aux XVème et XVIème siècles, le gothique flamboyant s'épanouit largement dans l'art des chapelles, disséminées par centaines dans les campagnes, qui assurent la permanence du caractère sacré ancré dans certains lieux(fontaines, sommets de colline...), objets de la piété populaire. Elles ne sont pourtant pas l'oeuvre des paysans mais des ducs, des grandes familles et des riches commerçants dont on aperçoit d'ailleurs les armoiries sculptées sur les façades. Réalisées par quelques ateliers spécialisés qui se déplaçaient dans la région, elles possèdent des éléments communs caractérisant cette art mais aussi sa grande variété.
Parfois jumelée à une chapelle plus petite, l'église gothique est en général accompagnée d'un ossuaire, d'un calvaire et meme parfois d'une fontaine qui composent l'enclos paroissial.
Afin d'obtenir une sculpture tant compliquée qu'élégante, les artisans utilisaient le "Kersanton"(roche balsamique au grain très fin).
Totalement intégrée à la Bretagne et réinterprété par la tradition locale, l'art gothique flamboyant resta longtemps le moyen d'expression de la création architecturale. Sans doute, répondait il aux aspirations religieuses mais également à un ensemble de structures sociales, économiques, mentales et culturelles. Les formules mises en place au XVème siècle furent reproduites jusqu'au XVIIIème dans les campagnes. Captées par des couches de plus en plus profondes de la population, elles deviennent véritablement un art populaire.
La Renaissance apparait dès le début du XVIème en pleine activité du gothique flamboyant, c'est l'époque où la Bretagne s'ouvre à la France. Les édifices s'agrémentent alors du décors des pilastres et candélabres des chateaux de la Loire. Des retables, statues et vitraux sont importés d'Allemagne et d'Italie. C'est au XVIIème que va se développer une prodigieuse adaptation de la Renaissance classique et qu'apparaitront les enclos paroissiaux.
La structure architecturale va demeurer celle des siècles passés mais se pare d' un nouveau décor parisien. Porches, ossuaires, grands calvaires et portes triomphales vont etre décorés avec splendeur, les artisans s'inspirant de l'oeuvre de Philippe Delorme(batisseur des tuileries).
L'intérieur des édifices va se voir doter d'un mobilier exceptionnel(XVIIème et XVIIIème). Un grand décor baroque plantureux et coloré monte à l'assaut du choeur et des chapelles latérales.
J'ai l'intention de vous faire découvrir quelques merveilles de cette époque et pour commencer je vous emmène à Pont Croix(à 4 kms de l'océan sur la route de la pointe du raz) dans le Finistère.
La collégiale de Pont Croix, dédiée à Notre Dame de Roscudon fut édifiée vers 12OO dans un style roman tardif. Son intérieur est marqué par des chapiteaux sobres et des arcades en plein cintre. L'église actuelle se compose d'une nef de six travées, d'un transept peu saillant et d'un choeur à quatre travées.
Vers 1299, le Seigneur Sinquin de Pont Croix fait agrandir le choeur initial et batir la chapelle du Rosaire. Plus tard, c'est sans doute en prévision de son mariage avec Alix de Tyvarlen(héritière des seigneurs de Pont Croix) que Jean Ier de Rosmadec fait construire le porche méridional.
L'arc surbaissé soutient un tympan ajouré surmonté d'un gable scuplté de rosaces. Deux contreforts dans le meme style sont surmontés chacun d'un ange. A l'intérieur de ce porche, six niches latérales accueillaient à l'origine les douze apotres.
De 1260 à nos jours, cette église s'est enrichie de travées, porches, sculptures, vitraux... Agrandie de deux travées en 192O, elle renferme également un retable, une chaise à precher du XVIIème, une sculpture en bois en haut relief de la Cène, une piéta ainsi que de nombreuses statues anciennes et débris de vitraux du XVIème siècle.
Le château de trécesson
Cela se passait aux environs de 1750, par une nuit d'automne, un braconnier était embusqué dans le parc du château et y guettait sa proie, quand il crut entendre un bruit lointain. Craignant d'être découvert, il cacha précipitamment son fusil et grimpa sur un arbre. A peine y était-il établi qu'il aperçut, à l'extrémité de la grande allée du parc, une voiture attelée de chevaux noirs et suivie de plusieurs domestiques qui portaient des torches allumées. L'équipage s'avançait lentement et presque sans bruit, aucune voix n'interrompait le silence de la nuit, qui n'était troublé que par le pas mesuré des chevaux et par le froissement des roues sur les branchages et les feuilles desséchées. Cet étrange cortège s'arrêta à quelques pas du braconnier, qui vit bientôt, à la lueur des torches, plusieurs hommes munis de bêches et de pioches, s'avancer de son côté et se mettre à creuser une fosse précisèment au pied de l'arbre sur lequel il se trouvait. Au même instant deux gentilshommes, dont le rang élevé s'annonçait par l'élégance et la recherche de leur costume, sortirent de la voiture et firent descendre avec violence une jeune femme richement parée. Elle portait une robe de soie blanche, sa tête était couronnée de fleurs, un bouquet ornait son sein, tout indiquait une jeune fiancée que l'on va conduire à l'autel, mais sa chevelure était en désordre et ses yeux pleins de larmes, ses joues pâles, ses gestes suppliants annonçaient assez qu'elle était en proie à l'épouvante. Traînée plutôt que soutenue par bourreaux, elle les implorait en sanglotant de ne pas lui arracher la vie. Ce fut en vain, ses persécuteurs demeurérent froids et inflexibles devant ses supplications désespérées.
Mes frères, mes amis, oh! je vous en supplie, ne me faites pas de mal. -Vos frères! non Madame, nous ne le sommes plus, vous avez cessé d'appartenir à la famille que vous déshonorez. -Au nom du ciel! ne me tuez pas. Faut-il donc mourir si jeune! Au moment d'atteindre au bonheur! Ah ! que la mort est affreuse. -Il faut pourtant vous y résigner, Madame, les pleurs sont inutiles, votre heure est venue, vous allez mourir.
La fosse était creusée, les cavaliers firent signe à leurs gens, qui s'emparèrent de la jeune dame. L'infortunée se débattit longtemps dans les bras de ses assassins, mais malgré ses efforts désespérés, malgré ses supplications et ses larmes, elle fut jetée dans la fosse qu'on recouvrit précipitamment de terre pour étouffer ses derniers gémissements, puis les deux seigneurs remontèrent dans la voiture, l'équipage s'éloigna au grand trot des chevaux, et quelque moment après, le parc de Trécesson avait repris son obscurité, son calme et son silence.
Pendant cette scène affreuse, le braconnier, le coeur serré par l'effroi, avait à peine pu respirer. Lorsque la voiture eut disparu, lorsqu'il eut cessé d'entendre le pas rapide et cadencé de l'attelage, il se décida à descendre de son arbre, mais, plein de trouble et d'épouvante, il ne songea pas à écarter la terre qui étouffait la malheureuse femme qu'on venait d'ensevelir sous ses yeux. ll courut en toute hâte chez lui, où il raconta, tout éperdu, à sa femme, le crime dont il avait été le témoin. Celle-ci fit de vifs reproches à son mari et l'accusa de lâcheté. L'entraînant ensuite, elle voulut aller dans le parc pour ouvrir la fosse, mais une réflexion terrible lui vint: si elle et son mari allaient être surpris auprès d'un cadavre à peine froid, ne leur imputerait-on pas l'acte affreux qui venait d'être commis? Cette crainte l'arrêta, elle jugea qu'il n'y avait rien de mieux à faire que de se rendre auprès de M. de Trécesson et de lui raconter ce qui s'était passé. Le braconnier et sa femme, introduits chez leur seigneur, purent à peine, tant ils éprouvaient de crainte, lui faire le récit du méfait qui venait d'être commis sur ses terres. Aussitôt que M. de Trécesson eut compris de quoi il s'agissait, il se hâta de faire appeler tous les gens de sa maison et de leur donner l'ordre le plus pressant de se rendre au lieu indiqué, où lui-même les suivit bientôt. Cependant ces démarches, ces préparatifs avaient emporté le temps. Le jour était prêt à paraître lorsque l'on put commencer à enlever la terre qui recouvrait la fosse. Dans tous les regards dirigés sur le même point, on lisait l'anxiété, l'espérance et la crainte. Enfin, lorsque le visage de la jeune dame parut à découvert, celle-ci ouvrit doucement les yeux, poussa un long soupir et ses yeux se refermèrent pour toujours.
M. de Trécesson fut profondèment affligé de cet événement. ll lui fit rendre les honneurs funèbres avec une pompe digne du rang qu'elle paraissait avoir occupé dans le monde. Par la suite, il fit de nombreuses démarches pour découvrir les assassins, mais toutes ces recherches furent inutiles, on ne put savoir ni le nom de celle qui avait disparu d'une si étrange manière, ni la cause du sort cruel qu'on lui avait fait subir, et cet évènement extraordinaire est toujours resté enveloppé d'impénétrables ténèbres. Le souvenir persista cependant, M. de Trécesson avait solennellement déposé dans la chapelle du château la robe nuptiale, le bouquet et la couronne de fleurs de la jeune et malheureuse fiancée qui restèrent sur l'autel, exposés à tous les regards, jusqu'à l'époque de la Révolution, époque à laquelle le lieu fut détruit.
Forêt de Brocéliande
Dans un précédent article, je vous ai annoncé que je développerai l'histoire de cette 'ville' un peu particulière.
Les pirates ont toujours fasciné les enfants et les adultes! Il n'en est pour preuve que le succès planétaire et répété du film ´Les Pirates des caraïbes'!
Mais Diégo est le cadre de la plus belle histoire de pirates de tous les temps: L'aventure fabuleuse de 'Libertalia'
L'histoire
Racontée, pour la première fois, dans l'Histoire générale des plus fameux pirates, publiée entre 1724 et 1728 par le Capitaine Johnson, elle relate les aventures du pirate Misson, petit noble provençal, et de son ami Caraccioli, prêtre italien défroqué.
Poussés par leur goût de l'aventure, les deux hommes s'engagent sur le vaisseau ´La Victoire' qui se rend aux Antilles. Au cours d'un combat contre les Anglais, les officiers sont tués et Misson prend le commandement du bateau, secondé par son ami Caraccioli. Se consacrant désormais à la piraterie, ils arrivent un jour à Anjouan où ils vont s'allier à la reine, en butte aux attaques du sultan de Mohely. Misson épouse la soeur de la reine, Caraccioli, sa nièce.
Continuant leurs aventures, ils s'emparent, en face du Mozambique, d'un navire portugais chargé d'or. Durant l'assaut, Caraccioli perd une jambe.
Ils arrivent enfin à Diégo-Suarez où séduits par les possibilités que leur offre la baie, ils décident de s'installer et de créer une république démocratique et égalitaire.
Fondation de Libertalia
Avec l'aide de 300 hommes fournis par la reine d'Anjouan, Misson et Caraccioli construisent, au fond de la baie des français une ville qui va accueillir non seulement les pirates mais tous ceux qui voudront se joindre à eux: équipages des bateaux arraisonnés, esclaves libérés, voyageurs capturés qui adhéreront aux principes de la nouvelle république.
La ville est baptisée Libertalia, ses habitants se donnant le nom de ´liberi'.
Lors d'une nouvelle course en mer, Misson se heurte à un autre vaisseau pirate, celui du Capitaine anglais Tew: le combat est sur le point de s'engager mais finalement les deux hommes vont conclure un accord et Tew va se joindre à l'aventure de Libertalia.
Les principes de la République de Libertalia
Caraccioli enseigne aux habitants de Libertalia, hommes de tous les milieux et de toutes les nationalités, les lois de l'égalité entre les hommes, de l'exigence de la liberté, de l'illégitimité de l'esclavage et de la peine de mort.
On ne tombe pas pour autant dans l'anarchie:
Caraccioli fit éloquemment l'éloge de l'ordre.
Le pouvoir reste dans les mains des fondateurs: Misson est nommé ´Lord Conservateur', Caraccioli est Secrétaire d'Etat, Tew, Amiral. Les hommes les plus instruits forment un Conseil qui édicte des lois. Si les prises sont équitablement réparties, la propriété privée n'est pas supprimée: les terres annexées dorénavant seraient tenues pour propriété inaliénable.
D'ailleurs les idées généreuses des ´philosophes' de Libertalia sont parfois mises en défaut: c'est ainsi que Misson et Tew capturent un vaisseau allant à La Mecque avec 1600 personnes à bord: débarquant les passagers, ils gardent une centaine de jeunes filles, destinées aux habitants de Libertalia!
La fin de Libertalia
La colonie fut détruite dans des circonstances obscures: alors que les rapports avec les indigènes du voisinage semblaient sereins, Libertalia fut attaquée une nuit par deux bandes armées : Caraccioli fut massacré avec la plupart des habitants, Misson put s'échapper mais trouva la mort dans un naufrage. Quant à Tew, absent au moment de l'attaque, il mourut plus tard dans un combat naval en mer Rouge.
Une histoire...imaginée par l'auteur de Robinson Crusoë
L'histoire de Libertalia a fait rêver et continue à faire rêver écrivains, penseurs et aventuriers.
Par son mélange d'aventure, d'idéalisme, d'exotisme, elle a tout pour séduire les âmes généreuses.
Cependant - et cela brisera le coeur de certains- il est vraisemblable que la cité idéale de la baie des français n'a jamais existé.
Pendant longtemps, son existence n'a pas été mise en doute, mais on sait de façon à peu près certaine maintenant que le Capitaine Johnson n'était autre que Daniel Defoe, auteur de Robinson Crusoë. Ce dernier aurait inventé de toutes pièces cette histoire pour exprimer sa critique des institutions politiques et religieuses de son époque.
Et, en fait, la réalité des évènements repose uniquement sur le récit de l'Histoire générale des Pirates: aucun document de l'époque, aucune archive, aucun vestige archéologique ne vient appuyer la possibilité de l'existence de Libertalia qui continue cependant à vivre dans l'imaginaire des nombreux écrivains qui ont repris l'histoire de Missson et de Caraccioli, comme Le Clézio, Vaxelaire, Le Bris et d'autres encore. Ou dans les rêves des nostalgiques qui viennent à Diégo tenter de retrouver le souffle, l'ardeur et la générosité de ces pirates au grand coeur.
Le renard dans le bassin VauBan
Lorsque je vous ai parlé de Surcouf, je vous ai précisé que je reviendrai sur le dernier navire qu'il a armé pour la course, ce n'est pas un hasard, vous allez comprendre pourquoi.
La course en Manche n'est plus ce qu'elle était, Surcouf a décroché des lointaines batailles en 1808 pour devenir un armateur et un bon père de famille, cependant les Anglais restent "l'Ennemi", ils sont devenus plus vigilants mais continuent à pilonner les côtes bretonnes.
En 1812, Surcouf arme le " Renard ", un cotre de 20 mètres rapide et manoeuvrant, portant 10 caronades et quatre canons. Il en confie le commandement à Emmanuel-Yves Leroux-Desrochettes. A son bord, 61 hommes. Le 8 septembre 1813, le "Renard" rencontre près des côtes anglaises la goélette de guerre "Alphéa", forte de 16 canons et autant de pierriers, et armée par 80 hommes d'élite. Le combat s'engage dans la nuit, meurtrier. Il demeure incertain, durant plusieurs heures, jusqu'au moment où une salve tirée par le cotre malouin atteint la réserve de poudre de la goélette qui explose et disparaît corps et biens. Le " Renard ", durement éprouvé et mené par les 13 hommes demeurant valides, rallie Diélette puis Saint-Malo. Il avait livré le dernier combat corsaire : quatre mois plus tard, la France abolissait la course. L'année suivante, Waterloo sonnait le glas de l'Empire.
Renaissance du Renard :
Une association de la ville de St Malo, qui cherchait à faire revivre un « gréement traditionnel », comme la bisquine réalisée à Cancale en 1987, va choisir ce navire corsaire.
La cancalaise
Il aurait dû rester dans l'histoire comme le cotre corsaire malouin qui a participé au dernier combat naval le long des côtes françaises. Mais 1 200 passionnés en ont décidé autrement.En 1989, la quille est posée.
En mai 1991, l'association Cotre corsaire de Saint-Malo, a lancé à l'eau la réplique exacte du Renard. Trente mètres de long pour 464 m² de voiles maximum au portant, avec trinquette et grand voile, rien n'a été omis ! « Il a été construit à l'identique sur des plans d'origine », rappelle François Viguié, responsable de la communication de l'association. Un an après, il accueillait ses premiers touristes à bord. Vingt deux ans plus tard, la tradition perdure, d'avril à octobre, avec des sorties en mer pour les touristes, en juillet et en août. La coque a nécessité 90 mètres-cubes de chêne. Les espars sont en pin massif. En revanche, la mâture et la voilure sont quelque peu réduites par rapport aux surfaces extrêmes portées par les cotres corsaires, contrebandiers ou douaniers de l'époque. Il possède 2 jeux de voiles, l'un en synthétique, l'autre en lin.
Le cotre est lancé le 18 mai 1991. Il participe à Brest 92 et à diverses fêtes marines, dont le centenaire vieux trois mâts,de la Duchesse Anne;célébré à Dunkerque en 2001.
Le port d'attache du bateau est Saint-Malo.
Rien n'est plus beau à mes yeux que les régates que s'imposent régulièrement la Cancalaise(bisquine) et le Renard(cotre). Flanc à flanc, ils fendent la lame fièrement comme du temps de leur splendeur. C'est un spectacle magnifique mais également émouvant qui nous ramène à il y a bien longtemps. Si vous passez dans le coin, je vous souhaite de tout coeur de pouvoir les admirer se pourchassant amicalement dans la baie.
Le renard
Fils de Charles-Ange Surcouf, sieur de Boisgris, et de Rose-Julienne Truchot de la Chesnais, il est notamment cousin de Duguay Trouin par sa mère Ses parents, commerçants, le destinaient à la prêtrise, mais il s'engage dès treize ans[ comme volontaire sur l'Aurore en partance vers les Indes. A vingt ans, il est déjà capitaine de La Créole qui fait le trafic d'esclaves. Aucun document ne permet de confirmer qu'il a commandé la Créole.
Surcouf embarque sur l'Aurore en 1789, il n'a pas encore 16 ans. C'est en 1787, à 13 ans et demi, qu'il a accompli son premier voyage sur le Héron.
Surcouf est né à Saint-Malo, rue du Pélicot pour certains, ou rue de la Bertaudière pour d'autres. Ce serait en 1787 qu'il embarque comme apprenti navigant (futur officier) sur le Héron qui part au cabotage.
En 1794, il est enseigne de vaisseau, faisant fonction de second sur la frégate la Cybelle dans l'océan indien. Il connaît son baptême du feu lors du 1er combat de la rivière noire à l'île de France: la Cybelle, la frégate Prudente et la corvette Jean Bart, parviennent à chasser deux petits vaisseaux britanniques de 50 et 44 canons qui assuraient le blocus de l'île. Ce sera le seul combat de Surcouf dans la marine de l'État, refusant toujours par la suite le commandement de frégates. Il va rapidement devenir corsaire et n'aura jamais dépassé le grade d'enseigne dans la marine officielle.
Nommé capitaine à l'âge de vingt ans, il commanda successivement les corsaires la Clarisse, la Confiance et le Revenant.
Quelques jeunes gens de l'île de France armèrent un petit corsaire pour Surcouf, qui fit voile pour les côtes de l'Inde, avec un équipage de Lascars (marins indiens). À l'embouchure du Bengale, où il se dirigea d'abord, il rencontra un petit convoi escorté par un bateau-pilote, armé en guerre ; il aborda le bateau-pilote et le prit ; il s'empara ensuite des bâtiments marchands britanniques, se débarrassa de ses prises, de son propre navire, et passa sur le schooner avec dix-neuf hommes seulement.
Mais Robert Surcouf, le plus célèbre des armateurs malouins, entre dans la légende à vingt-trois ans, en 1796 quand, avec un équipage de 190 hommes, il prend à l'abordage un grand vaisseau britannique, trois fois plus important et plus armé que le sien.
Ce premier succès enhardit Surcouf, qui va tenir la mer, courant après tous les bâtiments qu'il apercevra, en corsaire non autorisé, car il est parti de l'île de France sans ces lettres-patentes, qu'on appelle lettres de marque, qui donnaient au vol sur mer sa légalité.
Peu après, avec son bateau, n'ayant que deux canons, Robert Surcouf met le cap sur un gros trois-mâts : c'était un vaisseau de la Compagnie des Indes, monté par 150 Européens et armé de 26 canons de 12 ; il se nommait le Triton. Il dut son succès à un stratagème faisant cacher tout son équipage pour se faire passer pour un des pilotes du Gange. Surcouf se fit maître du vaisseau, n'ayant eu que deux blessés et un mort parmi les siens. Il fait signer un cartel d'échange à ses prisonniers, les envoie à Madras sur son petit schooner qu'il dépouille de toutes ses armes et mène son importante capture à l'île de France.
Il remet à la mer le plus tôt qu'il peut, pour profiter de la chance qui paraît lui sourire, et cette fois c'est avec un corsaire un peu plus grand.
Chassé par trois vaisseaux de la Compagnie, il parvient au moyen d'une manœuvre habile à les isoler ; puis, les attaquant séparément, il en enlève deux, et contraint le troisième à prendre la fuite.
Après plusieurs courses aventureuses, Robert Surcouf fut sur le point d'être dépouillé du fruit de ses dangers parce qu'il avait écumé la mer sans lettres de marque. Il avait armé en course sans autorisation à sa première croisière ; aussi quand il avait atterri avec le Triton, on avait confisqué sa prise.
Cependant les autorités de l'ile de France consultèrent le Directoire qui, voulant récompenser la bravoure du jeune corsaire, proposa au Corps Législatif de lui décerner, à titre de don national, la valeur de ses prises qu'on avait vendues au profit de la colonie ; il reçut 700.000 francs.
En 1801, il revint alors à à Saint Malo, et M. Blaise de Maisonneuve - armateur - le trouvant assez riche, il épousa celle pour l'amour de laquelle il avait pris une carrière aussi aventureuse. Il pouvait vivre heureux à Saint-Malo ; mais un marin ne renonce pas si aisément à la mer. Surcouf, armateur et capitaine, fit de nouvelles campagnes, heureuses comme les précédentes. Surcouf, riche et considéré, ne resta pas longtemps oisif. Il avait goûté de la mer, comme disent les marins, et la terre semblait fade et monotone. Ses tempêtes, ses courses, ses combats, lui manquaient ; il partit de nouveau.
Par la suite, d'autres corsaires prendront la mer sous son service.
Blason de Surcouf
Robert Surcouf est célèbre pour ses activités de corsaire, dont le fait d'armes que constitua la prise du Kent (le 7 ou 31 août ou encore le 7 octobre selon les sources, capture à la suite de laquelle on le surnomme le « Roi des Corsaires ») 1800 dans le Golfe du Bengale) et pour sa conception de la guerre sur mer contre la Grande Bretagne plus orientée vers la guerre d'usure que l'affrontement d'escadres. Après la paix avec la Grande-Bretagne et alors qu'il participait à un dîner en présence de ses anciens ennemis britanniques, l'un d'eux lui dit : « Enfin, Monsieur, avouez que vous, Français, vous battiez pour l'argent tandis que nous, Anglais, nous battions pour l'honneur… » Surcouf lui répondit d'un ton calme : « Certes, Monsieur, mais chacun se bat pour acquérir ce qu'il n'a pas. » Surcouf, n'était pas seulement valeureux marin, il avait aussi le sens de la repartie. Pour lui, il est plus efficace de saper l'économie de l'adversaire que de détruire ses navires armés. Il finança lui-même l'armement de nombreux navires de guerre légers :l'Auguste, la Dorade, la Biscayenne, l'Edouard, l'Espadon, leVille de Caen, l'Adolphe et le Renard(auquel je consacrerai un article).
Napoléon se déplacera en personne en 1803 pour le convaincre d'accepter une commission de capitaine (de vaisseau) et le commandement d'une escadre, que Surcouf refusera; on doit reconnaître qu'il n'avait pas tellement le sens de la discipline. Plaidant pour l'attaque des lignes de communication, peut-être a-t-il su convaincre son interlocuteur, puisque deux ans plus tard Napoléon instaurera un blocus économique contre la Grande-Bretagne; mais, après Trafalgar, il n'avait guère d'autre choix.
L'Empire abattu, Surcouf accomplit un autre exploit. Saint-Malo étant occupé par les Prussiens, il se prit de querelle avec eux et défia en duel tous les officiers du régiment concerné. Les Prussiens, se considérant comme experts au sabre, relevèrent l'offre très imprudemment: Surcouf tua ou blessa les 15 premiers à la suite mais laissa aller le dernier (qui était le plus jeune et devait probablement être quelque peu démoralisé par le spectacle auquel il avait assisté) pour qu'il puisse témoigner que tout s'était passé dans les règles. Après avoir disparu quelque temps, Surcouf revint tranquillement chez lui passer entre les siens le reste de sa vie.
Le nom de l'intrépide corsaire était devenu la terreur du commerce britannique dans les parages de l'Inde, et le gouvernement britannique avait cru devoir renforcer de plusieurs frégates sa station dans ces mers. En 1813, Surcouf fut chargé de conduire en France le Charles, vieille frégate, qu'il avait achetée au gouvernement et armée en flûte. Elle portait un très riche chargement. Il échappa par son sang-froid et l'habileté de ses manœuvres aux croisières britanniques et manqua de se perdre en entrant à Saint Malo; mais son frère sauva le navire.
Le frère du capitaine Surcouf, Nicolas Surcouf, intrépide marin comme lui, fut son second pendant près de 15 ans, et contribua à ses succès maritimes et commerciaux .
Surcouf consacra la dernière partie de sa vie à des spéculations commerciales, qui furent pour lui une nouvelle source de richesses. On croit que sa fortune s'élevait à la fin de sa vie à plus de 3 millions de francs.
Statue de Surcouf sur les remparts de St Malo
Mais quelles sont donc les différences entre Corsaires, Pirates, Boucaniers et autres....?
Je vais tenter de vous expliquer les différentes catégories de coureurs des mers de la grande époque avant de vous proposer un portrait du plus célèbre corsaire malouin, je cite Surcouf.
Le Pirate agit pour son propre compte, c'est un hors-la-loi qui parcourt les mers et qui pille, viole et bien souvent tue sans distinction de nationalité. S'il est pris, on le pend haut et court.
Haut pour que tout le monde le voit, et court pour économiser de la corde !
Le Corsaire, lui agit sur lettre de marque(ou de course) délivrée au nom du roi qui n'est pas forcément au courant. Ce papier est un document par lequel un pays le reconnaît comme force militaire auxiliaire. Les corsaires agissent au service de leur pays. S'il est capturé, il exhibe sa lettre de marque, ce qui lui assure le sort d'un prisonnier de guerre et lui évite la corde.
Le corsaire est tenu par sa lettre de marque, de n'attaquer exclusivement que les ennemis de son souverain, respectant les neutres et toujours ses propres concitoyens. En mer, il lui arrive quelque fois de ne pas avoir été informé de la paix survenue quelques jours auparavant, et en continuant son activité, il est traité tel un pirate.
Quelques corsaires peu scrupuleux profitaient de ce papier officiel pour piller et tuer les marchands comme les pirates.
La piraterie est vieille comme le monde et existe toujours, tandis que les corsaires ont sévit durant trois siècles (du XVIè au XIXè siècle).
Le Flibustier ou Frère de la Côte est un corsaire des Antilles qui va sus à l'Espagnol aux XVIIè et XVIIIè siècle (ce n'est pas un pirate !).
Le mot apparaît à la fin du XVIIè siècle (Furetière, 1690), mais il est usité depuis Dutertre en 1667. Ce mot se traduit par "freebooter" en anglais ; le sens littéral signifie "libre butineur". En français, ce mot est devenu "friboutier", sans que l'on puisse savoir à quelle époque il est devenu "le flibustier".
Le Boucanier est à l'origine chasseur d'animaux sauvages. Il traite la viande par un procédé de fumage appelé boucanage appris des Indiens Arawak, et fait du commerce avec les peaux.
A l'origine, les boucaniers occupent des terres sur l'île d'Hispaniola qui appartient à l'Espagne (aujourd'hui Haïti et la République Dominicaine). La raréfaction du gibier dans les îles ainsi que la tentative des espagnols d'évincer les boucaniers, leur font rejoindre la flibuste.
Le Forban est un pirate qui se livrait à des expéditions armées sur mer pour son propre compte, sans lettre de course.
Le Contrebandier se livre à du commerce clandestin de marchandises prohibées ou pour lesquelles on n'a pas acquitté les droits de douane.
Voici donc les différentes définitions qui permettent de connaître les activités de ces différents marins qui loin d'être des enfants de choeur tuent et pillent par appât du gain ou pour obéir à une hiérarchie royale.
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